Comores

 

 

réalisation

Dr Francis Louis, IMTSSA, Marseille

Dr Jean Julvez, Ministère des affaires Etrangères, Paris

Dr Ahmed Oulédi, Service de Lutte contre les Maladies à Transmission Vectorielle, Ministère de la Santé Publique et de la Population, Moroni, République Fédérale Islamique des Comores

 

assistance technique

cartographie : Françoise Payan

bibliographie : Odile Sossat

 

dernière mise à jour

15 septembre 2000

 

correspondance

Francis Louis


sommaire

données générales

les faciès épidémiologiques

les vecteurs

les chimiorésistances

la lutte antivectorielle

le programme national de lutte contre le paludisme

les instituts de recherche

les conseils aux voyageurs

les références bibliographiques

 




données générales

  • Superficie : 2 100 km2
  • Population de l'archipel : 550 000 habitants
  • Capitale : Moroni (île de Moroni ou Grande Comore)
  • Autres villes : île de Moroni (Mitsamiouli, Foumbouni, Mitsoudjé), île d'Anjouan (Mutsamudu, Domoni, Ouani, Sima), île de Mohéli (Fomboni, Ndréméani).
  • Monnaie : franc comorien.
  • Langues officielles : arabe et français.

 

 

Sur 192 pays, la République Fédérale islamique des Comores est au 147ème rang pour l'espérance de vie, au 159ème pour la mortalité infantile, au 150ème pour le PNB par habitant, au 179ème pour l'apport journalier en calories, au 161ème pour l'alphabétisation, au 145ème pour le taux de scolarisation (source : Atlas Encyclopédique Mondial, Nathan Ed., Paris 1996, pp.118-119).

Le climat est intertropical, alternant une saison chaude et humide de décembre à mi-avril et une saison fraîche et sèche de mi-avril à novembre. En fait, il existe de nombreux microclimats selon les îles, la position de la masse montagneuse et l'orientation par rapport au vent.

La température annuelle moyenne se situe entre 21 °C et 22 °C au dessus de 500 mètres et entre 25 °C et 26 °C sur la côte.

Les isohyètes moyennes annuelles de pluviométrie peuvent varier de 100 mm à plus de 3 000 mm selon l'altitude, le sens des vents et la masse montagneuse.

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les faciès épidémiologiques

1. Au début du vingtième siècle, la situation du paludisme est différente selon les îles : en 1901 à Anjouan (12 000 habitants à l'époque), Lafont évoque déjà des "régions redoutées des indigènes à cause du paludisme qui y sévit avec intensité" (1). Il précise : "il y a trois choses à redouter à Anjouan : le paludisme, l'insolation et les eaux contaminées". En 1902 à Moroni (50 000 habitants), Percheron n'observe pas de paludisme car "les moustiques sont peu nombreux" (2). En 1905 à Mohéli (6 000 habitants), Lafont décrit très bien la situation du paludisme : "la côte sud-ouest et ouest avec sa ceinture de palétuviers, ses cours d'eau nombreux, s'écoulant en pente douce vers la mer et formant de petits marécages, sa végétation puissante, est la partie la plus malsaine. Les moustiques sont légion, et parmi eux les variétés dangereuses, l'anophèle et le culex à filaire ; on les retrouve partout. La ville de Fomboni, située en contre-bas du littoral, avec ses citernes malpropres, ses rues inondées lors des pluies, est un foyer de moustiques et de malaria" (3).

2. C'est parce que Moroni était indemne de paludisme qu'une épidémie a pu se déclarer en 1924-1925 (4). Le parasite semble avoir été introduit en septembre 1923 à la pointe nord de l'île. Dans son enquête, Raynal note : "la morbidité a été presque générale dans les villages qui ont été touchés par ces vagues épidémiques. La mortalité a varié de 15 à 30% selon les endroits". Sur 25 200 habitants recensés, il y a eu vraisemblablement plus de 5 000 décès en deux ans. Pour les seuls centres médicaux de Moroni, Mitsamiouli et Fomboni (environ 7 000 habitants à l'époque), il y eut 1 000 consultations pour paludisme en mai 1925.

La propagation de l'épidémie à Moroni selon J. Raynal (4)

3. Aujourd'hui, on décrit trois faciès épidémiologiques du paludisme aux Comores (#8) :

  • des zones de transmission permanente : toute l'île de la Grande Comore, les côtes sus-ouest et est d'Anjouan et toute la frange côtière de Mohéli ;
  • des zones de transmission irrégulière : toutes les zones situées en altitude à Anjouan et Mohéli ;
  • une zone indemne de paludisme : les "hauts" d'Anjouan.

Plasmodium falciparum représente 90 % des parasites isolés, Plasmodium malariae 8 %, Plasmodium vivax 1,6 % et Plasmodium ovale 0,4 % (#8).

L'indice plasmodique des enfants de 2 à 9 ans varie de 20 à 70 % (environ 50 % à Moroni) sur la Grande Comore, de 23 à 46 % à Mohéli. Il n'est pas précisé à Anjouan (#8).

Le paludisme est aujourd'hui au premier rang des affections déclarées en RFI des Comores (tableau) (#8).

affection
Grande Comore
Anjouan
Mohéli
Total
Taux d'incidence p.1000 hbts
Paludisme
460
12038
884
13382
26,2
Parasitoses intestinales
54
3308
113
3475
6,8
Insuff. resp. aiguës
246
2302
283
2831
5,5
Maladies diarrhéiques
75
1771
216
2062
4,0
Anémie
176
1488
241
1905
3,7

Les 5 premières pathologies déclarées aux Comores en 1996 (#8)

4. Les données métropolitaines :

Dans son rapport annuel sur le paludisme d'importation, le CNRMI a enregistré 3069 cas en 1998, dont 11,5 % en provenance des Comores, ce qui place l'archipel au deuxième rang des pays de contamination, derrière la Côte d'Ivoire (20 %) et devant le Cameroun (11,3 %)(23).

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les vecteurs

1. En 1977, Jacques Brunhes identifie 6 espèces d'anophèles aux Comores : Anopheles coustani, Anopheles funestus, Anopheles gambiae, Anopheles maculipalpis, Anopheles mascarensis et Anopheles pretoriensis (tableau) (7, 9).

Anophèles
Grande Comore
Anjouan
Mohéli
Anopheles coustani
+
+
Anopheles funestus
+
+
Anopheles gambiae
+
+
+
Anopheles maculipalpis
+
Anopheles mascarensis
+
+
Anopheles pretoriensis
+
+
+

Distribution des anophèles aux Comores (7, 9)

2. En 1987, Sixte Blanchy évoque la possibilité de la présence d'Anopheles merus et d'Anopheles arabiensis, mais la preuve n'en a pas été apportée (11). V. Petrarca et Coll. précisent en 1990 qu'il s'agit bien d'Anopheles gambiae sensu stricto et qu'il n'y a pas d'autre espèce du complexe (15).

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les chimiorésistances

1. Résistance à la chloroquine :

La première mention d'une chloroquinorésistance in vitro a été faite en 1987 par Jacques Le Bras et Coll.qui ont trouvé 1 souche plasmodiale résistante sur 14 testées (12).

La première enquête publiée de chimiosensibilité in vivo de Plasmodium falciparum à la chloroquine a été réalisée en 1988 et 1989 sur 74 enfants dans 10 sites de Grande Comore et 1 site de Mohéli, avec 25 mg de chloroquine/kg répartis sur 3 jours (14). De cette étude, on peut retenir que 1,35 % des enfants avaient encore des parasites dans le sang au septième jour.

Une autre étude de la chimiosensibilité in vivo a été réalisée à Anjouan sur 27 malades, de décembre 1990 à mars 1991 (19). A J7, 6 patients (22,2 %) avaient encore une parasitémie.

Le rapport annuel de 1998 du Service de lutte contre les maladies à transmission vectorielle fait état de deux enquêtes de chimiosensibilité à Foumbouyni (Grande Comore) et à Nioumachoua (Mohéli), mais les résultats n'ont pas été publiés (#7).

2. Résistance aux autres antipaludiques :

Dans leur publication de 1987, Jacques Le Bras et Coll. font état d'une bonne sensibilité in vitro à la monodeséthylamodiaquine (3 souches plasmodiales testées), à la quinine (11 souches testées) et à la méfloquine (8 souches testées)(12). Aucune autre étude n'a été publiée.

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la lutte antivectorielle

La lutte antivectorielle est un des éléments essentiels de la lutte contre le paludisme aux Comores. Dirigée contre Anopheles gambiae et Anopheles funestus, elle est larvicide et imagocide.

De 1954 à 1957 elle a reposé sur des pulvérisations intradomiciliaires de dieldrine. En 1972, l'association DDT-fénitrothion a été utilisée en aspersions intradomiciliaires à Anjouan et Mohéli. En 1973 et 1974, une lutte antilarvaire par téméphos a été entreprise en Grande Comore (20). En 1987, à la suite des essais concluants menés par J. Julvez à La Réunion et à Mayotte, un essai d'introduction du poisson larvivore Poecilia reticulata a été réalisé par G. Sabatinelli et Coll. et a donné des résultats intéressants (17). Cet essai ne semble pas avoir été poursuivi.

Aujourd'hui; la lutte antivectorielle repose à peu près exclusivement sur une politique de mise en place de moustiquaires imprégnées d'insecticides rémanents.

Aucune résistance des anophèles aux insecticides n'a encore été décrite.

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le programme national de lutte contre le paludisme (PNLP)

1. Il est dirigé par le Dr Ahmed Oulédi qui y est employé à temps plein et qui dispose de 5 agents de santé pour l'aider dans sa tâche.

2. Le programme de lutte repose sur :

  • la prise en charge des cas
  • la surveillance de la chimiosensibilité
  • la chimioprophylaxie
  • la lutte antivectorielle.

3. En 1998, le PNLP a :

  • poursuivi ses actions de formation/recyclage des techniciens de laboratoire, des infirmiers et des sage-femmes ;
  • assuré la diffusion du "guide pratique du paludisme" au niveau de toutes les formations sanitaires ;
  • mis en place un centre sentinelle de surveillance de la chimiosensibilité à Mohéli ;
  • doté 10 districts sanitaires en petit matériel de laboratoire et réactifs;
  • élaboré un plan national de promotion des moustiquaires imprégnées ;
  • ouvert des centres d'imprégnation dans tous les districts sanitaires de Mohéli et de la Grande Comore, ainsi que dans un district d'Anjouan ;
  • soutenu la mise en place de 40 comités de lutte contre le paludisme à Mohéli ;
  • conçu des affiches d'informatiuon/éducation ;
  • réalisé des émissions radio et TV ainsi que des articles de presse et des conférences-débat ;
  • organisé des réunions et des ateliers de sensibilisation.

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les instituts de recherche

Les seules activités de recherche opérationnelle (chimiosensibilité, lutte antivectorielle) sont réalisées par le PNLP.

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les conseils aux voyageurs

Les Comores sont classées en zone III de chloroquinorésistance (B.E.H. n°23/99), ce qui signifie que la chimioprophylaxie recommandée aux voyageurs s'y rendant est la méfloquine, quelle que soit l'île et quelle que soit la saison.

On n'oubliera pas les mesures individuelles de protection contre les nuisances culicidiennes : répulsifs cutanés et moustiquaires imprégnées d'insecticide rémanent.

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les références bibliographiques (seul le premier auteur est indiqué)

1. LAFONT - L'île d'Anjouan. Ann. Hyg. Med. Col. 1901 ; 4 : 157-192.

2. PERCHERON - La Grande Comore. Ann. Hyg. Med. Col. 1902 ; 5 : 533-558.

3. LAFONT - Mohéli. Ann. Hyg. Med. Col. 1905 ; 8 : 497-521.

4. RAYNAL J. - Enquête sanitaire à la Grande Comore en 1925, observation de paludisme à forme épidémique. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1928 ; 21 : 35-54 et 132-141.

5. LAVERGNE J. - Etude malariologique de l'Archipel Comorien. Rev. Col. Med. Chir. 1949 ; 162 : 134-164.

6. PAULIAN R. - Composition et origine de l'entomofaune comorienne. Bull. Soc. Entomol. Fr. 1964 ; 69 : 167-173.

7. BRUNHES J. - Les moustiques de l'archipel des Comores. 1. Inventaire, répartition et description de quatre espèces ou sous-espèces nouvelles. Cah. ORSTOM, ser. Ent. med. et Parasitol. 1977 ; 15 : 131-152.

8. VIETTE P. - L'entomologie dans l'archipel des Comores. Mem. Museum Nat.Histoire Naturelle, série A 1978 ; 109 : 27-37.

9. BRUNHES J. - Les insectes hématophages de l'archipel des Comores (Diptera Culicidae, Simuliidae, Tabanidae, Hippoboscidae et Muscidae stomoxyinae ; Hemiptera cimicidae), maladies transmises et méthodes de lutte. Mem. Museum Nat.Histoire Naturelle, série A 1978 ; 109 : 193-246.

10. PENE P. - Le paludisme d'importation dans les hôpitaux de Marseille de 1973 à 1976 : caractères épidémiologiques. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1978 ; 71 : 596-605.

11. BLANCHY S. - Epidémiologie du paludisme en République Fédérale Islamique des Comores. Données actuelles. Cah. ORSTOM, ser. Ent. med. et Parasitol. 1987 ; spécial : 45-52.

12. LE BRAS J. - Sensibilité de Plasmodium falciparum aux quinoléines et stratégies thérapeutiques : comparaison de la situation en Afrique et à Madagascar entre 1983 et 1986. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1987 ; 80 : 477-489.

13. JULVEZ J. - Le paludisme dans les îles de l'archipel des Comores. Eléments historiques et géophysiques, considérations épidémiologiques. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1988 ; 81 : 847-853.

14. BLANCHY S. - Chimiosensibilité in vivo de Plasmodium falciparum en République Fédérale Islamique des Comores. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1989 ; 82 : 493-502.

15. PETRARCA V. - The Anopheles gambiae complex in the Federal Islamic Republic of Comoros (Indian Ocean) : some cytogenetic and biometric data. Parassitologia 1990 ; 32 : 371-380.

16. BLANCHY A. - Morbidité palustre en Grande Comore. Med. Trop. 1990 ; 50 : 209-214.

17. SABATINELLI G. - Impact de l'utilisation du poisson larvivore Poecilia reticulata sur la transmission du paludisme en République Fédérale Islamique des Comores. Ann. Parasitol. Hum. Comp. 1991 ; 66 : 84-88.

18. SABATINELLI G. - Les taux d'anticorps anti-protéine circumsporozoïtique de Plasmodium falciparum et leur utilisation comme indicateur épidémiologique de la transmission du paludisme en en République Fédérale Islamique des Comores. Ann. Parasitol. Hum. Comp. 1991 ; 66 : 179-184.

19. FEILLET N. - Résistance in vivo à la chloroquine de Plasmodium falciparum à Anjouan (Comores). Bull. Soc. Pathol. Exot. 1993 ; 86 : 48-51.

20. OULEDI A. - Epidémiologie et contrôle du paludisme en République Fédérale Islamique des Comores. Santé 1995 ; 5 : 368-370.

21. JOSSE R. - Nouvelle approche sanitaire en République Fédérale Islamique des Comores. Med. Trop. 1995 ; 55 : 205-208.

22. BLANCHY S. - Stratification épidémiologique du paludisme dans l'archipel des Comores. Bull. Soc. Pathol. Exot. 1999 ; 92 : 177-184.

23. LEGROS F. - Paludisme en France métropolitaine en 1998. Bull. CNRMI 1999 ; n°15 : 1-34.

Autres sources documentaires

#1. BLANCHY S. - Programme détaillé de lutte antipaludique par la lutte antivectorielle aux Comores. Doc. 87/025/MSPP/DPSP/Palu, 11 mai 1987, 21 p.

#2. BLANCHY S. - Situation épidémiologique du paludisme aux Comores en 1988. Troisième Séminaire Inter-Iles de l'Océan Indien sur le Paludisme, La Réunion, 14-18 novembre 1988.

#3. BLANCHY S. - Programme de lutte contre le paludisme aux Comores : objectifs et stratégie. Troisième Séminaire Inter-Iles de l'Océan Indien sur le Paludisme, La Réunion, 14-18 novembre 1988.

#4. SABATINELLI G. - Moyens d'investiugation et de recherche dans le programme de lutte contre le paludisme et la filariose dans la R.F.I. des Comores. Troisième Séminaire Inter-Iles de l'Océan Indien sur le Paludisme, La Réunion, 14-18 novembre 1988.

#5. SABATINELLI G. - Expérimentation du poisson larvivore Poecilia reticulata dans la lutte contre le paludisme en R.F.I. des Comores. Doc. WHO/MAL/90.1060, 1990, 10 p.

#6. BLANCHY S. - Stratification épidémiologique du paludisme en République Fédérale Islamique des Comores. Doc. dactylographié 1991 ; 36 p.

#7. OULEDI A. - Rapport annuel 1998. Doc. 99/002/MSPP/SLMTV/PALU 1999 ; 15 p.

#8. ANONYME - Situation du paludisme aux Comores. Doc. dactylographié 1999 ; 8 p.

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